Le conte traditionnel et le conte philosophique sont des récits courts de fiction ; si celui-là intègre des éléments merveilleux ou extraordinaires (fées, trésor, licorne, etc), celui-ci présente une intrigue plus réaliste qui conduit son lecteur à la réflexion : s’opposer à une attitude, suivre un modèle, ridiculiser un comportement, etc.
L’auteur fait la critique d’une situation et la met en scène : pouvoir politique, conjonctures économiques, injustices commises, fanatisme religieux, mœurs… Le contexte du débat peut être métaphysique (Voltaire critiquait la philosophie de l’optimisme de Leibniz dans Candide ou l’optimisme), réel (Supplément au voyage de Bougainville de Diderot) fictif (Le Baron perché d’Italo Calvino) ou imaginaire, voire symbolique (Jonathan Livingston le Goéland de Richard Bach).
Au XVIIIe siècle, ce type de récit eut son heure de gloire, les Lumières usèrent de ce moyen pour contourner la censure de l’époque et répandre leurs idées auprès du grand public ; ils s’adressaient ainsi à des gens parfois illettrés et friands de littérature d’amusement. Car le conte philosophique se place à mi-chemin entre le divertissement et la littérature d’idées ; l’auteur peut recourir à plusieurs techniques littéraires pour atteindre son objectif : amuser, émouvoir, parodier, caricaturer ou ironiser, entre autres.
Le conte philosophique se distingue des autres textes de réflexion, comme l’essai, l’éditorial ou le livre de philosophie. Dans le premier cas, l’auteur dresse le tableau de la situation qu’il tient à critiquer, d’ailleurs le titre rappelle parfois le nom du héros : Micromégas, Le Petit Prince ; alors que l’essayiste commente ou déduit des pensées à partir de mesures statistiques et vérifiables et l’éditorialiste s’appuie sur des faits d’actualité pour défendre une position ; quant au philosophe lui-même, il se place dans le débat abstrait, évitant même de l’illustrer pas des situations concrètes.
De fait, le conte philosophique trouve sa place dans les concours de nouvelles ou les appels à textes, alors qu’un essai est destiné à d’autres supports.