L’histoire et le récit, des temps différents

Le 24/08/2024 0

L’histoire et le récit possèdent leur propre temporalité : une vie de 80 ans se raconte en deux heures de narration. L’auteur varie leur rythme.

Il faut distinguer l’histoire d’un côté et le récit de l’autre : l’histoire comprend les événements racontés, comme les rencontres, les attentes, les pensées, etc. alors que le récit correspond à la manière de conter les faits. Il existe une multitude de manières de raconter la même histoire

Selon l’effet voulu, le rapport entre le temps de l’histoire et celui du récit varie :
- pour donner une impression d’immédiateté, détailler une action ou augmenter l’intensité dramatique, vous ralentissez l’histoire et créez des scènes ;
- pour souligner un moment intense de l’intrigue, passer sous silence des moments banals ou résumer un long évènement, vous accélérez et composez des sommaires ;
- pour passer sous silence des éléments sans intérêt ou produire un effet de surprise, l’accélération est extrême grâce aux ellipses ;
- pour augmentation de l’intensité dramatique ou ménager du suspens, vous allez au contraire vous servir de ralentis (terme aussi utilisé au cinéma) ;
- enfin, pour suspendre l’intrigue, ménager le suspense ou fournir des informations sur les personnages et leur environnement, vous ferez des pauses.

Comment organiser votre récit ?
Vous disposez ainsi de plusieurs outils, pour organiser et rythmer le temps de votre histoire : sauter dans le temps en avant ou en arrière, avancer plus ou moins vite, ménager des moments en suspension. En outre, vous avez aussi le choix entre une présentation linéaire, chronologique des événements et un ordre original, adapté à votre narration, par exemple raconter une vie en abordant tour à tour les formations, les amours, les emplois, les engagements de votre personnage.
Cet ordre non linéaire utilise deux figures de style : l’analepse (le flasback au cinéma) et le prolepse (la fée de La Belle au bois dormant rassure la mère en annonçant cent années de sommeil pour la fille… et Perrault saute allègrement ce siècle), sans oublier qu’il est possible de mixer les deux.

En ce qui concerne le rythme, cinq moyens de raconter vous attendent :

  • la scène détaille l’événement et immerge le lecteur ; vous donnez l’impression de vivre les actions en temps réel ; dans un dialogue, les événements se déroulent au rythme de la conversation.
  • le sommaire accélère la narration, vous résumez les événements ou une longue période sans entrer dans les détails.
  • l’ellipse condense le temps, vous ignorez alors les événements moins pertinents. Une année d’absence se résumera à la phrase : La famille fêta son retour, l’allégresse enflamma les cœurs.
  • le ralenti met l’accent sur des détails ; vous intensifiez un moment crucial, augmentez la tension ou la réflexion. La narration passe du temps sur un moment qui n’a duré que quelques secondes : l’amoureux qui s’interroge sur un choix, la découverte du cadavre avant d’ouvrir l’enquête.
  • l’allongement et la suspension de la narration permettent de donner davantage d’importance à un élément sur lequel le narrateur veut que le lecteur s’attarde.

La longueur des phrases tient un rôle majeur pour varier le rythme.
Les courtes phrases accélèrent le récit et la respiration du lecteur. Très courtes, elles instillent un sentiment d’urgence, voire de danger ou, plus rare, d’apathie/désintérêt, en fonction du contexte. Dans une phrase longue, des virgules bien placées pour la tronçonner en petites sections rapides peuvent aussi jouer ce rôle.
La ponctuation est la respiration de la phrase, si votre ponctuation est défaillante, le souffle est bancal et donc s’asphyxie.
En général, les phrases longues ralentissent le récit. Elles sont souvent utilisées pour décrire.
Dans l’alternance entre court et long, les phrases “moyennes” servent de transition.
Une phrase longue suivie par une phrase brève : le focus est sur la phrase brève, il se passe un truc.
Une phrase brève suivie par une phrase longue indique qu'il s’est passé un truc, mais tout est en train de revenir à la normale, ou du moins, il y a un début d’explication.

Ces éléments sont des repères, pas des vérités absolues : pensez à ce que cela signifierait de pouvoir enseigner et apprendre l'art d'écrire, disait Virginia Woolf ; nous ne prétendrons jamais le posséder !

écriture méthode auteur

Ajouter un commentaire

Anti-spam